Excision, difficile d’arrêter l’hémorragie
La communauté internationale a célébré le dimanche 6 février 2011, la journée internationale de la lutte contre l’excision. Au pays des hommes intègres, malgré les campagnes de sensibilisation, la pratique reste fortement ancrée dans les mœurs, jusque même chez les plus intellectuels.
Le Burkina Faso a engagé la lutte contre l’excision depuis une dizaine d’années. Les chefs traditionnels et religieux se sont engagés aux côtés des autorités politiques pour éradiquer ce phénomène. Seulement, entre les discours et les actes, il y a un écart. Des intellectuels ont contribué à répandre l’idée selon laquelle cette lutte est une forme d’impérialisme, une invention des Blanc pour détourner les Noirs de leur coutume. Cela s’explique aussi par le fait que la lutte contre l’excision a été déclenchée depuis l’arrivée des prêtes blancs. Ouagadougou devrait en principe être l’épicentre de la lutte contre cette ablation pratique. Cependant, même les intellectuels ne semblent pas convaincus par les différents messages de sensibilisation. Beaucoup d’entre eux, en cachette, envoient les enfants au village pour les faire exciser.
La cérémonie de l’excision (dans certaines localités) a lieu généralement après les récoltes. Pour éviter tout soupçon, ces derniers font exciser leurs filles pour que la blessure se cicatrise avant la rentrée scolaire. Dans de telles situations, il est presque impossible de dénoncer car « ce sont les grands types de Ouagadougou ». Plus besoin de nos jours de cérémonies rituels qui pourrait éveillés la vigilance.
Si l’engagement des chefs traditionnels et religieux, combiné aux mesures plus ou moins draconiennes des autorités politiques portent des fruits, les résultats ne sont pas ceux escomptés. Certains acteurs de la lutte ne sont engagés que devant les caméras et les micros. « Pourquoi peut-on circoncire les garçons et les filles ne peuvent pas être excisées ? ». Voilà la question que vous posent certains d’entre eux.
Au moins une femme séjournerait à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) chaque année pour ces mutilations génitales. Quelques gouttes d’eau dans la mer. Malgré la prison, des cas de récidives sont enregistrés. Les pratiquantes seraient encore plus nombreuses à s’adonner à la pratique. Il arrive que des femmes évoquent l’influence de génies qui leur obligeraient à exciser. Pour ces genres de situations, arrêter devient encore plus difficile.
Les femmes sont les plus réfractaires à la lutte contre ce phénomène. Une fille excisée n’a pas encore acquis sa féminité. Cette conception est encore forte au Burkina Faso. « Le clitoris, c’est comme le pénis. Si on ne l’enlève pas, pendant les relations sexuelles, il suce le sang de l’homme », entend-t-on souvent dire. Pour cette raison, quelques filles adultes et non excisées se rendent au village en catimini pour se couper cette membrane. Des rumeurs de cas pareilles sont légions. Des familles l’exigent avant le mariage quand ils découvrent que la fille n’a pas été excisée.
Le gouvernement a appelé la population à dénoncer tout cas d’excision ou de tentative d’excision. Cet appel n’est entendu que par quelques fonctionnaires des villages reculés. Qui oserait dénoncer une vieille de soixante ans dans son village ? Les gens voient se taisent et laissent faire. Tout cela rend plus difficile la lutte contre l’excision au Burkina Faso. Le gouvernement doit revoir sa copie s’il veut que la lutte soit plus efficace. L’ennemie n’est pas toujours loin.
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