Sams’K Le Jah du Balai Citoyen : « Beaucoup sont déçus par l’opposition »

Article : Sams’K Le Jah du Balai Citoyen : « Beaucoup sont déçus par l’opposition »
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20 octobre 2013

Sams’K Le Jah du Balai Citoyen : « Beaucoup sont déçus par l’opposition »

L’artiste « reggaemaker » burkinabè Sams’K le Jah a créé avec son ami Smockey, un autre artiste, le mouvement « Balai Citoyen » dont l’objectif, selon eux, est d’assainir la scène politique burkinabè et susciter une prise de conscience des  jeunes sur leurs conditions de vie. Le mouvement s’est illustré à travers des participations des marches contre l’institution d’une deuxième chambre et la vie chère au Burkina. Dans cet entretien Sams’K Le Jah parle du groupe, du sankarisme et de certains problèmes sociopolitiques.

 

Sams'K Le Jah estime que le "Balai Citoyen" est différent du mouvement "Y'en a marre"
Sams’K Le Jah estime que le « Balai Citoyen » est différent du mouvement « Y’en a marre »

 

Boukari Ouédraogo (B.O) : Vous avez créé depuis quelques mois le « Balai Citoyen » avec des amis. Peut-on dire que ce mouvement est une copie parfaite de « Y’en a marre » qu’on a connu au Sénégal

Sams’K Le Jah (SKJ): Copie parfaite ? Non. Ce n’est pas une copie parfaite. Nous sommes engagés dans la lutte depuis des années. Nous nous sommes retrouvés pour mettre ensemble nos efforts. C’est vrai qu’on s’inspire de bon nombre de mouvements qui ont existé comme « Y’en a marre » au Sénégal. J’ai particulièrement rencontré les leaders du groupe. On a discuté et nous nous sommes donné des idées. Copie conforme ce n’est donc pas le cas.

B.O : Quelle est donc la différence entre « Y’en a marre » et le « Balai Citoyen »?

SKJ : La première différence, c’est la date de naissance (rires). En plus, les réalités sociopolitiques ne sont pas les mêmes. Nous ne pouvons pas forcément appliquer ce qu’ils ont fait au Sénégal ici (ndlr, Burkina Faso). Nous aussi nous avons nos réalités sociopolitiques. Nous sommes obligés de fonctionner en tenant compte de cela.

B.O : L’objectif du « Balai Citoyen » en ce moment, c’est de lutter contre l’instauration d’un Sénat mais aussi la cherté de la vie. A part cela, quels sont les autres objectifs de votre mouvement ?

SKJ : L’objectif pour nous, c’est d’avoir un pays normal. Il faut d’abord dire que j’utilise le terme pays « normal » avant François Hollande. Il ne faut pas penser que c’est lui qui m’a inspiré. Non (rires). Pour nous, c’est avoir un pays avec une vraie démocratie. Un pays où ceux qui ont édicté des règles démocratiques respectent eux-mêmes ces règles préétablies. Parmi ces règles se trouve la clause de l’article 37 qui limite le mandat présidentiel à deux quinquennats. Contre le Sénat, pour la bonne et simple raison que Blaise  (ndlr Blaise Compaoré, Président du Faso) ne peut pas aujourd’hui se rappeler qu’il doit renforcer la démocratie. La Constitution existe depuis 1991. Ce n’est pas à deux ans de la fin de son mandat qu’il va se rappeler qu’il doit renforcer la démocratie. Comme je le dis dans l’une de mes chansons la panoplie d’institutions n’est pas signe de vitalité démocratique, quand le judiciaire devient la concubine de l’exécutif. Il y a des institutions qui existent. Il faut arriver à les faire fonctionner normalement avant de nous proposer d’autres choses. En plus d’être budgétivore, parce c’est ce même président, c’est son parti qui il y a dix ans en 2002, avait dit que la deuxième chambre était budgétivore lourde de façon administrative… patati-patata. On se rend compte qu’économiquement et socialement, le Burkina n’a pas fait de progrès dans le sens du positif. Mais comment cela se fait que dans cette situation de galère, que ce soit maintenant qu’on veuille mettre en place le Sénat. Il y a une contradiction qu’on ne peut pas accepter. Si Sénat il doit y avoir que ce soit après Blaise, pas avant lui.

Quand je te dis un Burkina normal, c’est d’avoir un Burkina débarrassé de toutes les injustices même si cela relève de l’utopie. Qu’on arrive à se battre pour assurer le minimum de dignité, d’éducation de santé au peuple, que les jeunes apprennent à rêver. Aujourd’hui pour avoir une parcelle, c’est la croix et la bannière. Sous la révolution avec une photocopie de ta pièce d’identité, tu avais une parcelle. Aujourd’hui,  il y a des mairies  qui se sont enrichies de façon illicite sur la vente des parcelles. Dans l’administration, il y a trop de corruption. C’est tout cela qu’on veut combattre. Il faut qu’on arrive à être une force citoyenne qui impose des vues à l’administration. Quand tu prends un pays comme les Etats-Unis, quand tu déposes un dossier, tu as un numéro et tu peux appeler pour savoir à quel niveau se trouve le dossier et combien tu dois payer. Il faut qu’on arrive à cela. Il faut que les uns apprennent à voir un changement à la tête de l’Etat. Quand vous avez un premier ministre (ndlr, Luc Adolphte Tiao) qui va s’assoir à la télé pour dire qu’ils ne peuvent pas mettre fin au délestage, c’est un aveu d’impuissance, d’incompétence. Nous voulons des gens compétents. Nous voulons des gens qui veulent qu’il y ait un changement qualitatif pour le peuple.

« On lutte de façon désorganisée »

B.O : Vous ne pensez donc pas qu’il y a nécessité de renforcer la démocratie au Burkina en rapport avec la suppression du Sénat parce que Sams’ K Le Jah a toujours dénoncé le manque de démocratie dans ce pays ?

 SKJ : Qu’est-ce vous appelez démocratie ? Si la démocratie doit être pour que Blaise Compaoré sa famille et ses amis aient tous les privilèges au détriment du peuple, je n’appelle pas cela la démocratie. La démocratie, c’est le pouvoir du peuple par le peuple. Le sénat, le peuple dans sa grande  majorité a dit qu’il n’en veut pas. Il ne faut pas forcer. Après son congrès, le CDP  (ndlr Congrès pour la démocratie et le progrès) appelle au dialogue. C’est parce qu’ils se rendent compte qu’ils n’ont pas le rapport de force en leur faveur. S’ils avaient le rapport de force en leur faveur, ils allaient imposer le Sénat. Le travail au sein du « Balai Citoyen », c’est de continuer la sensibilisation auprès de la jeunesse. Beaucoup sont déçus par l’opposition. Ils sont déçus parce qu’ils luttent, mais rien ne change. Rien ne change parce qu’on lutte de façon désorganisée. Si on sort, on s’organise, on lutte et on impose notre vision, vous verrez que les choses vont avancer. Ce n’est plus une question de gauche ou de droite. C’est une question d’être avec le peuple.

B.O : On vous voit très souvent aux côtés de l’opposition dans les différentes manifestations. Ne craignez-vous pas qu’on vous confonde avec l’opposition qu’ils ont critiquée ?

SKJ : Je ne peux pas être là pour espérer que les gens me jugent positivement ou négativement. J’ai du travail à faire. Comme les rastas le disent, je suis un homme vivant. J’ai ma mission à mener.  Un point. Un trait.

B.O : Alors quelle est la différence entre ce que vous faites et ce que l’opposition fait parce qu’on a l’impression que c’est la même chose ?

SKJ : D’abord nous ne sommes pas un parti politique. En plus, nous ne menons pas nos actions pour que les gens nous fassent les yeux doux. Nous sommes sur le terrain d’abord pour nous-mêmes parce que nous nous disons qu’à travers la lutte, nous pouvons améliorer les conditions de vie des uns et des autres. Nous sommes des artistes. Nos clients, c’est le peuple. Quand Sams’ K Le Jah et Smockey sortent un CD, c’est le peuple qui achète. Si ce peuple ne vient pas à nos concerts, s’ils n’achètent pas les CD, cela ne nous permet pas de mener nos activités qui sont la musique. Il faut donc réunir les choses pour que le peuple soit dans une certaine condition et permettre aux citoyens de jouir de ce que ce pays produit. Comme on le dit, il faut permettre à chacun d’avoir sa part du gâteau.  

B.O : «  A part Blaise Compaoré, personne ne peut diriger le pays ». C’est ce qu’on attend souvent dire. Que pensez-vous de ça ?

SKJ : C’est normal. Quand vous avez des gens petits d’esprit, ils ne peuvent que penser de cette façon. Le Burkina Faso existait avant Blaise Compaoré, le Burkina Faso existera après Blaise Compaoré. Quand quelqu’un vous dit, si on remplace Blaise qui va prendre le pouvoir ? il remet en cause l’éducation que ses parents lui ont donnée. Ses parents ont investi inutilement sur celui qui pense comme cela. Quelqu’un qui a un minimum d’esprit ne peut pas penser comme cela. Avec ou sans Blaise Compaoré, le Burkina Faso existe, a existé et existera. C’est notre conviction.

B.O : Dans tout ce que vous faites en ce moment, qu’est-ce qui est le plus difficile ?

SKJ : C’est le combat lui-même. Il s’agit de se mettre dans une dynamique. Je ne pense pas aux difficultés du combat. Je ne pense pas aux conséquences négatives du combat. Je sais que j’ai un combat à mener, c’est tout.

« Tu seras jugé en fonction de tes actions »

B.O : Vous et Smockey, êtes des artistes. Alors est-ce que le combat que vous menez n’occupe pas votre temps ?

SKJ : Etre sur le terrain n’empêche pas notre création musicale. Bien au contraire, on a  de nouveaux sujets, de nouveaux thèmes pour écrire des chansons. Depuis ces deux dernières années, avec ma guitare, je ne sais même plus combien de chansons j’ai composées. Le quotidien nous inspire tous les jours. Il y a trop de choses à dire.  Cela n’empêche pas nos activités. C’est vrai que souvent, tu sors de chez toi à 6 heures ou 7 heures et tu rentres chez toi à 3 heures ou 4 heures du matin. Mais ce n’est pas tous les jours que cela se fait. Beaucoup de jeunes croient en nous. Il faut qu’on mérite leur confiance. Pour mériter leur confiance, il faut continuer de travailler. Il faut leur donner des garanties pour leur dire qu’on n’est pas au-devant de la lutte pour espérer se faire remarquer pour espérer et avoir des financements. Il y a beaucoup de gens qui le diront. « On a vu des leaders passer au-devant de la lutte, après ils ont eu une 4×4, une villa et ils ont vendu la lutte ». Non. Je n’ai pas besoin d’ouvrir mon ventre pour montrer ma sincérité. Comme on le dit chez les Rastas « let you work be seen », tu seras jugé en fonction de tes actions.

B.O : Est-ce que le Balai Citoyen à vocation devenir un parti politique un jour ?

SKJ : Ce n’est pas ma préoccupation. Déjà (il hésite) je n’aime pas la politique politicienne… Noon, je veux rester quelqu’un d’indépendant. Personnellement, ce n’est pas dans mes rêves. Je peux, peut-être, être conseiller ou bien maire ou député s’il y a des candidatures indépendantes. Mais à vouloir être dans un parti politique, dans une certaine mesure abuser des uns et des autres, ce n’est pas dans ma vocation.

 

Le slogan du Balai Citoyen sur le dos du shirt de Sams'K Le Jah
Le slogan du Balai Citoyen sur le dos du shirt de Sams’K Le Jah

B.O : Député, maire et la présidence  du Faso?

 SKJ : Je suis déjà président (il sourit). J’ai du monde derrière. J’ai beaucoup de fans derrière moi. Cela me suffit largement.

B.O : Je veux dire diriger ce pays…

SKJ : Dans ce que je fais, je dirige déjà le pays. Je n’ai pas besoin d’être à Kossyam (quartier abritant le palais présidentiel du Burkina) pour diriger ce pays. Diriger ce pays suppose susciter, donner de l’espoir à certaines personnes, leur redonner confiance, leur dire que chacun dans son coin peut diriger ce pays.

B.O : Si vos partisans vous y poussent ?

SKJ : Personne ne peut me pousser. Rassurez-vous. Je n’ai pas 16 ans ! J’ai plus de 43 ans.

« Quand on a tué Sankara, beaucoup sont restés les bras croisés »

B.O : Vous dites que le « Balai Citoyen » a un programme de société. De quoi s’agit-il ?        

SKJ : Le programme de société du « Balai Citoyen », c’est un Burkina normal où existent le mieux vivre pour les uns et les autres. Bientôt, on va organiser des conventions de jeunesses. On va demander à chaque groupe de faire des propositions sur leur vision pour le Burkina. Nous ferons une synthèse et nous produirons un document que nous allons proposer ou plutôt imposer à ceux qui vont prendre les devants pour leur dire voici ce que la jeunesse dans sa grande majorité veut pour ce pays. Donc vous êtes tenus de l’appliquer. Il y a des chefs d’Etat, ce n’est pas par manque de volonté, mais c’est parce qu’on leur impose des choses de dehors. Si on arrive à leur imposer des choses du dehors, il faut qu’on arrive à leur imposer des choses depuis l’intérieur parce qu’ils ne sont pas là pour les gens du dehors ils sont là pour le peuple. On dira qu’on a tué Sankara parce qu’il voulait le développement de son peuple. C’est parce qu’à l’époque, il n’avait pas de mouvement à l’image du Balai Citoyen. Ce n’est pas pour insulter ceux qui étaient là, mais c’est parce ceux qui étaient là n’avaient pas atteint un certain niveau d’organisation. La preuve, quand on a tué Sankara, tout le monde est resté les bras croisés tellement ils ont été pris dans le choc. S’il y avait des mouvements comme le « Balai Citoyen », Norbert Zongo n’aurait pas été assassiné. Il faut qu’on arrive à instaurer des mouvements qui élèvent le niveau de vigilance, un mouvement sentinelle. Même moi qui vous parle, on peut m’éliminer. Mais ma crainte n’est pas de me faire éliminer. Il faut que ce pour quoi on se bat, que la jeunesse comprenne que soit on nous élimine tous ou bien ils nous écoutent.

B.O : D’abord, on vous a connu en tant que défenseur de l’idéologie sankariste. Aujourd’hui, vous avez élargi le combat. Le constat, les partis sankaristes sont divisés. Quelle analyse faîtes-vous de la situation?

SKJ : Je trouve déjà que les parties sankaristes nous compliquent la tâche. L’un des combats qu’on va également mener, même si c’est en dehors du « Balai Citoyen », c’est de forcer ces gens à trouver un  seul représentant pour parler au nom de Thomas Sankara. Il n’y a pas deux Sankara. Il y a un seul Sankara. Les fantoches qui se disent partis sankaristes, il va falloir qu’on sache qui est qui, qui fait quoi et avec ou avec qui. On est fatigué que des gens viennent se dire sankaristes parce qu’ils ont mangé dans le même plat que Thomas Sankara. Ils sont sankaristes parce qu’ils ont salué Sankara. Non. Arrêtez ça ! Thomas Sankara, de façon claire, il avait un projet de société. Vous êtes là des partis sankaristes incapables d’exploiter cela. Il faut que les gens arrêtent !

B.O : Est-ce que parmi ces partis, il y a certains qui vous inspirent confiance ?

SKJ : Je ne suis pas là pour juger quelqu’un. Ce que je veux, c’est qu’il y ait un seul pour représenter Thomas Sankara et on va travailler ensemble pour mettre en œuvre le projet de société de Thomas Sankara. On ne veut pas qu’il y ait des comédiens qui se sentent sankaristes quand il y a seulement des élections. Pour nous, il ne faut pas que les partis sankaristes  attendent seulement les élections pour commencer à exister. Il y a des partis sankaristes qui ont des députés à l’assemblée qui gagnent des millions  par an. Est-ce qu’ils ne peuvent pas se mettre ensemble pour créer ne serait-ce qu’un forage par an ? C’est dans les actions qu’on juge les gens. Il ne faut pas attendre d’être président avant de commencer. Nous sommes des artistes et avec des amis qu’on a rencontrés en France, j’ai pu faire un forage dans un village. J’ai compris que c’était possible. Cela ne coûte pas plus de cinq millions. Alors que ces hommes gagnent plus de cinq millions par mois. C’est un minimum. J’ai discuté avec un ingénieur des BTP qui m’a fait savoir qu’avec 30 millions on peut construire un centre de santé avec des logements pour les infirmiers. Est-ce qu’ils ont besoin d’arriver au pouvoir avant de faire ça ? Qu’ils arrêtent de mentir au peuple (sa voix commence à monter). On n’a pas besoin de prendre la place de Blaise avant de commencer à travailler pour le peuple. Ils ont des millions, ils achètent des 4×4 de 50, 70 millions, qu’ils utilisent cet argent … C’est vrai qu’ils ont besoin de 4×4 pour circuler, mais ils sont d’abord des représentants du peuple. Travaillez pour le peuple. C’est en posant des actes concrets comme ça qu’on pourrait avoir de vrais opposants. Si c’est demander aux gens de venir à « la place de la révolution » (ndlr, la place de révolution s’appelle désormais place de la nationale, mais certains refusent cette appellation) pour dire on ne veut pas ceci. Mais tu as fait quoi ? C’est là où on voit les gens.

B.O : Il y a la théorie du « balayeur balayé ». Vous n’avez pas peur de cela ?

SKJ : Si on doit me balayer parce que j’ai vendu la lutte, qu’on me balaie. On ne souhaite pas être des gens qui vendent la lutte. « Balayeur balayé », si on balaie, peut-être qu’il y a des jeunes plus chauds que nous qui trouveront qu’on est trop lent. En ce moment, on cède la place. On n’a pas peur de cela. Ma seule peur, c’est qu’un jour qu’on dise que j’ai vendu la lutte. Je ne pense pas à moi, mais je pense à mes enfants.

B.O : Revenons au sankarisme. Pour ceux qui ne le connaissent pas, qu’est ce que c’est ?

SKJ : C’est un mode vie. Etre intègre, honnête, digne, travailleur. C’est ce que Thomas Sankara nous a enseigné : l’intégrité, la dignité, le travail. Il ne faut être des caméléons équilibristes, ne pas être tricheur. « Pionnier oser lutter savoir vaincre. Vivre en révolutionnaire mourir en révolutionnaire armes à la main. La patrie ou la mort nous vaincrons » (propagande du temps de la révolution burkinabè entre 1983 et 1987). C’est la patrie d’abord. Ce n’est pas une patrie où c’est un minable individu, qui a bénéficié du soutien de gens lugubres pour obtenir les devants, qui fait chier tout le monde.

B.O : On a vu le gouvernement burkinabè qui a pris des mesures après les multiples marches et mouvement sur la vie chère, le Sénat. Que pensez-vous  de ces mesures-là ?

SKJ : C’est une fuite en avant. Les histoires de boutiques témoins, c’est une fuite en avant. Vous-même qui êtes assis, honnêtement, est-ce que vous avez déjà vu des boutiques témoins ? Je n’ai pas besoin de mettre de l’essence pour rejoindre une boutique. Il faut que le gouvernement ait le courage de dire que le kilo de riz fait tant de franc Cfa partout, même chose pour l’huile, le savon le sucre. On ne veut pas de boutique témoin. D’ailleurs, mes amis me disent que la tonne de ciment coûte moins chère à Ziniaré (ndlr, ville d’origine de Blaise Compaoré) qu’à Ouagadougou. Pourquoi ? Il y a quelqu’un qui m’a dit qu’il est allé vérifier, mais tu ne peux pas acheter ce ciment et sortir de Ziniaré avec. Tu construis sur place.

B.O : Que pensez-vous de ce drame des émigrés clandestins dont le bateau a chaviré à Lampedusa ?

SKJ : Ce n’est pas la première fois qu’il y a eu ce type de drame à Ceuta. Blaise à l’époque avait dit que si rien n’était fait l’envahissement allait continuer. Mais quelque part nous sommes tous responsables de cette situation.

B.O : Comment ?

SKJ:  Nous avons échoué à convaincre les jeunes Africains de rester en Afrique. Il y a des jeunes Africains qui sont prêts à débourser deux millions dans l’espoir d’avoir un visa américain pour aller aux Etats-Unis. Si on arrive à leur démontrer qu’avec deux millions on peut devenir des hommes d’affaire dans ce pays, ils ne partiront pas. En plus, si l’Occident cesse de soutenir des dictateurs comme les Blaise, les Sassou, les Idriss et tous ces gars qui sont au pouvoir depuis des années et qui ne veulent pas partir et imposent la bonne gouvernance, vous verrez que moins de jeunes voudront partir là bas. Le fait le plus énervant, c’est que l’Occident, que ce soit l’Europe ou les Etats-Unis se soient construits grâce à l’immigration. Donc aujourd’hui, c’est inadmissible qu’on demande un visa à un citoyen du monde pour se rendre ici ou là. La Déclaration nous permet de jouir de nos libertés d’aller et venir. C’est une fois une bêtise de nos politiciens qui ont imposé ces questions de visas. C’est ce qui pousse les gens à aller se suicider de la sorte. Les Erythréens, les Somaliens, c’est parce que ça ne va pas chez eux. C’est l’Occident qui a monté l’Erythrée pour demander une séparation d’avec l’Ethiopie. Ils ont financé la guerre de l’Erythrée contre la Somalie. Au lieu que l’Ethiopie croule, elle n’a fait que monté. L’Ethiopie, ce n’est pas n’importe quoi dans l’histoire de l’humanité. C’est toujours en Afrique, qu’il y a des foyers de guerre…

B.O : Les révolutions qui ont échoué dans les pays arabes, la poussée des islamistes en Afrique noire. Est-ce que tout cela vous surprend ?

SKJ : Je n’appelle pas ça de l’islamisme, mais du fanatisme. J’ai lu le Coran. Le Coran n’incite pas les gens à la violence. Le Coran prône le respect de l’autre. Jésus dans les évangiles a dit d’aimer son prochain comme soi même. Mohamed est venu compléter cet amour par le respect, la solidarité agissante quand il dit de s’occuper de l’étranger, de la veuve et l’orphelin. La zakat qu’on fait… Le jour de la fête partager sa nourriture avec ses voisins, c’est ce que Mohamed est venu enseigner. Mais maintenant, il y a des gens qui n’ont pas lu le Coran, qui ne connaissent rien dans l’histoire de l’islam. Il y a des gens qui peuvent boire un verre de bière qui sont saouls. Il y a des gens qui peuvent finir un casier et ils sont sereins. On ne peut pas imposer un certain nombre de choses aux gens. C’est une histoire de « feeling ». C’est comme si quelqu’un vient dire « Sams’K Le Jah coupe tes dreads ». On a déjà eu ces genres de débats… Je leur dit, « tu ne connais pas la Bible, tu ne connais pas le Coran. Je porte des dreads comme les rastas. Dans l’islam il y a des gens qui portent des dreadlocks. Jésus est un africain, Mohamed est un africain. Tous les peuples sont africains parce que l’origine de l‘humanité, c’est l’Afrique. Donc arrêtez de faire de la comédie, arrêtez de dire du n’importe quoi aux gens ». Je ne crois pas que ce soit des musulmans. Pour moi ce sont des voyous. Il y a pleins de gens parmi eux qui sont des trafiquants de drogue, d’armes avec des complices.

B.O : Vous avez un message particulier ?

SKJ: C’est d’inviter les jeunes à s’inscrire au « Balai Citoyen ». « Monter vos clubs « cibals » parce que bientôt, on va lancer de grandes manifestations d’envergure nationale.  Luc Adolphe Tiao a dit qu’ils ne peuvent pas finir les délestages. On va le faire partir s’il ne peut pas le faire. On l’a mis là pour cela ». 

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Commentaires

toure namidja
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il faut tu sois associé aux discussions qui se feront dans ses heures. il y'a un vide ,alors saisi ta chance celle de devenir désormais un leader engagé au burkina faso

Boukari Ouédraogo
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Peut-être qu'il le fera. Attendons juste de voir.